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DOSSIER : La puissance de la vulnérabilité Témoignage de Brené Brown

DOSSIER : La puissance de la vulnérabilité   Témoignage de Brené Brown

L’organisatrice d’un évènement pour lequel je devais donner une conférence m’a téléphoné pour me poser une question : « Je vous ai déjà vue en conférence et j’ai du mal à trouver comment vous décrire dans notre prospectus. » Je me suis demandé où était le problème. Je suis une chercheuse. Mais elle craignait qu’en écrivant chercheuse personne ne vienne parce qu’ils allaient penser que je suis ennuyeuse. Elle a ensuite ajouté : « Ce que j’ai aimé dans votre conférence, c’est que vous êtes une conteuse d’histoires. Alors je pourrais dire que vous êtes une conteuse? » Moi!


Témoignage de Brené Brown, Travailleuse sociale, auteure et conférencière internationale

Bien sûr mon côté universitaire qui manque d’assurance a réagi. J’ai essayé de rassembler mon courage pour me dire : je suis une chercheuse en sciences humaines; je recueille des histoires et ensuite je les raconte. Conteuse, c’est bien ce que je suis. Et peut-être que les histoires ne sont rien d’autre que des données scientifiques avec une âme…

Nous avons fini par trouver un terrain d’entente : chercheuse-conteuse. Alors comme je suis une chercheuse-conteuse, je vais vous raconter quelques histoires sur une partie de mes recherches, des histoires qui ont fondamentalement élargi ma perception de la vie et réellement, concrètement, changé ma façon de vivre, d’aimer, de travailler et d’élever mes enfants.  


Il était une fois…
Voilà où mon histoire commence… Quand j’étais une jeune chercheuse, doctorante, j’ai eu un directeur de recherche qui nous a dit : « Voilà le topo : ce qu’on ne peut pas mesurer n’existe pas. » Comme je pensais qu’il essayait de nous leurrer, j’ai répliqué : « Vraiment? » et lui : « Absolument! »    

Moi qui avais une licence et un diplôme de maitrise en assistance sociale et qui préparais une thèse sur le sujet, j’avais passé toute ma carrière universitaire entourée de personnes qui croyaient que la vie est un gigantesque désordre et qu’il fallait l’aimer ainsi. Je me disais plutôt : « Si la vie est un désordre, alors il faut la nettoyer, l’organiser et bien la ranger dans des petites cases. » 

Cette idée m’a enthousiasmée. C’est exactement la carrière qu’il me fallait! Pourquoi? Parce que j’aime les sujets compliqués et que je veux pouvoir les simplifier. Je veux m’infiltrer dans ces questions que je sais importantes et les décoder pour les rendre accessibles à tout le monde.


La relation avant tout!
J’allais donc entreprendre ma recherche par les relations humaines. Quand vous avez travaillé dans le domaine social pendant 10 ans, vous réalisez que les relations humaines sont la raison de notre présence sur Terre. C’est ce qui donne un but et du sens à nos vies. Tout tourne autour de cela. 

Peu importe que vous en discutiez avec des gens qui travaillent dans le secteur de la justice sociale ou de la santé mentale, de la maltraitance, de la négligence parentale, tous vous diront que sur le plan neurobiologique, nous sommes faits pour être en relation. C’est la raison de notre existence. 


Plus on la ressent, moins on en parle
Très rapidement, en fait après seulement six semaines de recherches, j’ai buté sur une chose sans nom qui détruisait totalement les relations d’une façon que je ne comprenais pas. J’ai donc pris un peu de recul et je me suis dit qu’il fallait absolument que je comprenne de quoi il s’agissait. J’ai découvert qu’il s’agissait de la honte. 

Comment comprendre la honte? Il suffit de se poser la question : « Y a-t-il quelque chose chez moi qui ferait en sorte que si d’autres l’apprenaient ou le voyaient, je ne mériterais plus d’être en relation avec eux? » Avoir honte d’une partie de nous est universel. On l’a tous. Les seules personnes qui n’éprouvent pas la honte sont celles qui sont incapables d’empathie ou de relations humaines. Personne ne veut en parler et plus on la ressent, moins on en parle, et moins on en parle, plus on la ressent.


Je ne suis pas assez…
Le sentiment à la base de cette honte est un sentiment que nous connaissons tous, ce fameux je ne suis pas assez… Je ne suis pas assez gentille, pas assez intelligente, pas assez mince, pas assez riche, pas assez beau, pas assez débrouillard, pas assez populaire… 

Et quelle est la cause de tout ça? C’est la vulnérabilité, cette idée que pour pouvoir entrer réellement et profondément en relation avec les autres, nous devons nous montrer vraiment tels que nous sommes avec tous. On doit donc montrer notre vulnérabilité. Mais qu’est-ce qui nous fait si peur?

Version intégrale du texte dans le numéro où est paru cet article

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