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MON DOC ET MOI : D’abord et avant tout… RESPIREZ!!!

MON DOC ET MOI : D’abord et avant tout… RESPIREZ!!!

Faire ce qu’il faut pour être en santé, ça devrait être à la fois naturel et simple. Mais avouons que c’est quand même rendu un peu compliqué. Et je ne parle même pas de la gestion des maladies. Je parle juste d’être en santé!

Par Catherine Bouchard
 

Nous devons simplement manger sainement, avoir un sommeil réparateur, pratiquer un exercice sur une base régulière et gérer notre stress sainement. Le problème, c’est que tout ça doit cohabiter avec un rythme de vie effréné et un tourbillon de choses à faire pour le train-train quotidien.

La respiration, le pilier de la santé
Quand je leur propose un nouveau « devoir » à faire pour orienter leur vie vers une meilleure santé, je peux comprendre mes patients de me répondre avec un peu de découragement : « Je ne sais pas comment je vais y arriver… ». Je leur réponds : « Je comprends… Alors, pour votre santé, pouvez-vous simplement respirer! »

Respirer, soit ce que nous faisons déjà inconsciemment plus de 20 000 fois par jour, est un outil précieux pour notre santé! La respiration serait même le pilier oublié de la santé! Cette action, simple et complexe à la fois, a des répercussions importantes partout dans notre corps. La clé de la réussite pour une respiration saine est dans l’équilibre. J’y reviendrai… Mais tout d’abord, laissez-moi vous expliquer comment fonctionne notre cycle respiratoire, celui qui est à la base de toutes nos fonctions vitales.

Oui, je sais… Cette fois-ci mon article est plus technique. Mais je crois que mieux on connait un système et plus on peut en retirer tous les bénéfices qu’il est en mesure de nous offrir!

Tout le monde à bord!
L’air que nous inspirons, gorgé d’oxygène, entre dans nos voies respiratoires. Il passe par le nez, la gorge, puis entre dans nos poumons, ensuite dans les bronches, les bronchioles et finalement dans de toutes petites alvéoles. Si nous mettions bout à bout toutes les sections de nos voies respiratoires l’une à la suite de l’autre, nous pourrions relier les 2500 km qui séparent Québec et Terre-Neuve. Impressionnant, non!

L’oxygène se rend ainsi à l’une des 300 millions d’alvéoles qui agissent comme des gares de transit permettant à l’oxygène de « monter à bord » de l’hémoglobine, leur molécule de transport, pour se diriger vers le système circulatoire.

L’oxygène va ainsi voyager vers les différents tissus et muscles du corps. Il pourra alors alimenter nos petites usines d’énergie, les mitochondries. Le « déchet » résultant de cette production d’énergie, le dioxyde de carbone (CO2), montera à son tour à bord de l’hémoglobine pour être retourné à l’expéditeur – les poumons – via la circulation sanguine. Il sera alors expulsé du corps lors de l’expiration par les voies respiratoires. Ce voyage d’aller-retour n’aura duré qu’une toute petite minute.

Depuis la nuit des temps
La respiration est donc à la base de notre vie, de toutes les fonctions de notre corps, de toutes les actions de chacune de nos cellules. Il n’est donc pas surprenant de constater que plusieurs disciplines ancestrales, comme le yoga et la méditation, soient basées sur la respiration. Par exemple, depuis des milliers d’années, les exercices de respiration sont intégrés aux pratiques de yoga tel le pranayama, du sanskrit « prana » signifiant respiration, énergie, force vitale et « ayama » signifiant contrôle ou régulation.

Dans la Grèce antique, et chez les civilisations romaines, d’un point de vue philosophique et théologique, le souffle symbolisait la Vie. Avec le temps, l’importance de la respiration n’a jamais perdu en popularité. Une étude d’envergure publiée en 1940, l’étude de Framingham, qui avait étudié 5209 patients sur une période de 20 ans, démontrait que la capacité respiratoire représentait l’un des facteurs prédictifs les plus importants de la santé cardiovasculaire.

Tout est dans l’équilibre
Mais saviez-vous que la clé ne se situe pas nécessairement dans l’inspiration d’oxygène? Contrairement à la pensée populaire, la respiration ne se résume pas à l’entrée d’oxygène et à la sortie du déchet, le dioxyde de carbone. L’équation est bien plus complexe et c’est là que la notion d’équilibre prend tout son sens. Chez une personne ayant des poumons en santé, l’apport en oxygène est rarement problématique. Que nous respirions 10 ou 40 fois par minute, nous n’irons pas chercher plus d’oxygène. Mais croyez-le ou non, le grand manitou dans toute l’équation est plutôt le dioxyde de carbone (CO2)!

C’est au début des années 1900, après avoir été étudié en profondeur, que le dioxyde de carbone est monté sur la première marche du podium, passant devant l’oxygène! Il a même été qualifié de « composante fondamentale de la matière vivante » par le célèbre physiologiste américain Yandell Henderson.

Son prédécesseur, Christian Bohr, avait démontré que c’est grâce au dioxyde de carbone que l’oxygène pouvait être libéré de l’hémoglobine pour pénétrer dans la cellule. L’effet Bohr démontrait que plus notre taux de CO2 est élevé dans le sang, meilleure sera notre libération d’oxygène dans les cellules. L’inverse étant aussi vrai.

Le héros n’est pas celui qu’on pense
Donc, la quantité d’oxygène que nous donnons à nos cellules dépend en grande partie à la quantité de dioxyde de carbone. Ce gaz, longtemps perçu comme un simple déchet de l’organisme, est au contraire un puissant régulateur de notre oxygénation qui possède aussi d’autres bienfaits importants…

Le CO2 favorise la relaxation des muscles, la dilatation des vaisseaux sanguins et celle des voies respiratoires. Si on se souvient que le CO2 est éliminé lors de l’expiration, ainsi, respirer plus rapidement signifie diminuer notre niveau de dioxyde de carbone et ainsi perdre les bénéfices qui y sont associés.

Les études actuelles se penchent donc de plus en plus sur les effets néfastes de la « surrespiration », soit le fait de respirer trop fréquemment. La diminution de la quantité du dioxyde de carbone pourrait d’ailleurs être impliquée dans plusieurs problèmes de santé chroniques. L’équilibre inspiration-expiration est donc ultra important à considérer.

Et il y a plus encore!
Mais l’importance du CO2 sur la santé ne s’arrête pas là! Comme cette molécule est acidifiante pour l’organisme, le dioxyde de carbone est aussi impliqué dans l’équilibre du pH sanguin. Une élimination de CO2 par une hyperventilation (respiration rapide) amènera un pH sanguin plus alcalin (élevé) et, à l’inverse, une rétention de CO2 par une hypoventilation (respiration lente) rendra le sang plus acide (pH plus bas).

Ainsi, le dioxyde de carbone contribue au maintien du pH du corps qui, lui, recherche constamment l’équilibre vers un pH neutre. Cette recherche constante d’équilibre se fait grâce à un autre organe important : nos reins. Ce sont eux qui vont venir compléter l’équation visant cet équilibre.

L’équilibre, c’est la clé!
Nos reins jouent un rôle de tampon grâce au bicarbonate dont la production/excrétion est régulée par les reins, le bicarbonate étant une substance alcalinisante. Dans un contexte de débalancement du pH de courte durée, ce système de retour à l’équilibre va très bien fonctionner. Par exemple, lorsque nous courons pour ne pas manquer le bus, notre respiration va s’accélérer (hyperventilation), notre taux de CO2 (acidifiant) va diminuer et notre pH sanguin sera alors alcalinisé. Les reins vont alors prendre la relève en excrétant plus de bicarbonate, permettant au sang de passer d’un pH trop alcalin à un pH neutre.

De façon chronique, une « sur-respiration » causera constamment une recherche d’équilibre par les reins. Le travail acharné et chronique des reins pour compenser sera possiblement responsable de la perte d’autres minéraux tels que le magnésium et le potassium. À long terme, ces déséquilibres pourraient être la source de problèmes musculaires tels que des spasmes ou une certaine fragilisation osseuse.

Mais toujours dans l’idée de recherche d’équilibre, vous imaginez bien qu’une trop grande retenue de CO2 pourrait aussi être à la base de d’autres problèmes de santé. Encore une fois, la clé se situe dans l’équilibre.

Respire par le nez!
Saviez-vous que bien respirer, ça commence simplement par respirer par le nez? Le nez est aussi un organe dont on sous-estime l’importance. Grâce aux poils dans les narines, il est responsable de filtrer l’air et d’en retirer les particules indésirables. Il contribue aussi à humidifier et réchauffer l’air inspiré.

Ainsi, lorsque nous inspirons par la bouche, l’air ne sera ni filtré, ni humidifié, ni réchauffé comme il le devrait. La respiration buccale est aussi problématique lors de l’expiration parce que l’expiration buccale libère beaucoup plus de CO2, chose que nous voulons éviter.

Expirer par la bouche provoque aussi une perte importante d’eau par évaporation. La respiration buccale ferait perdre 40% plus d’eau que la respiration nasale. Elle peut donc contribuer à la déshydratation. C’est d’ailleurs l’une des raisons pour lesquelles vous vous sentez déshydratés lorsque vous êtes congestionné…

Droite-Action / Gauche-Détente
La respiration nasale serait aussi associée à l’activation de notre système nerveux autonome, ce système qui fonctionne à deux vitesses, le système sympathique et le parasympathique, le premier étant associé à la mise en action du corps comme dans les situations de fuite et de combat et le second étant associé aux fonctions de détente comme le repos et la digestion.

Encore ici, l’équilibre est la clé. Ces deux systèmes doivent fonctionner en équilibre pour que nos fonctions vitales soient en harmonie. Des études ont même mis en évidence la contribution des narines non seulement dans l’activation du système nerveux autonome, mais aussi dans l’activation des zones du cerveau.

La narine droite pourrait être associée à l’activation du système nerveux sympathique (mise en action) mais aussi à la stimulation des zones cérébrales du cerveau gauche en lien avec le traitement de l’information et la prise de décision.

À l’inverse, la narine gauche serait associée à l’activation du système nerveux parasympathique (détente) et à la stimulation des zones du cerveau droit reliées à la pensée créative. Ces hypothèses, pour le moins intéressantes, ont mené au développement de techniques respiratoires spécifiques où l’on alterne entre le passage de l’air de la narine droite à la narine gauche.

Absolument tout, en nous, possède son utilité!
Les sinus, ces cavités osseuses situées autour du nez, ont aussi une importance dans le processus respiratoire. Stimulés lors de la respiration nasale, les sinus paranasaux relâchent une enzyme, la NO-synthase, responsable de la production de quantités importantes d’un gaz nommé oxyde nitrique ou monoxyde d’azote. Ce gaz est doté de puissantes fonctions qui sont essentielles pour le corps.

Comme il possède un effet dilatateur sur les voies respiratoires et sanguines, il permet donc de diminuer la tension artérielle et de dilater les voies respiratoires. On dit aussi qu’il agirait comme puissant messager cellulaire permettant la communication entre les 50 milliards de cellules qui composent notre corps. La découverte de cette molécule a non seulement été à l’origine d’un prix Nobel, mais aussi de profits faramineux pour la compagnie qui a commercialisé le Viagra pour ses raisons vasodilatatrices bien connues.

Inspire, retiens, expire
Mais au-delà de ses effets sur les vaisseaux, les voies respiratoires et les fonctions sexuelles, l’oxyde nitrique contribue aussi aux fonctions cognitives, à l’immunité et même à une diminution des bouffées de chaleur en ménopause. Outre que le fait de respirer par le nez soit bon pour notre santé, le fait de retenir sa respiration pour environ 20 secondes entre deux inspire/expire serait une bonne façon d’augmenter notre niveau d’oxyde nitrique et ainsi d’en tirer tous les bénéfices.

Je vous propose d’ailleurs un petit exercice. La prochaine fois que vous souffrirez de congestion nasale, essayez de retenir votre souffle pour une vingtaine de secondes entre deux respirations en pinçant votre nez et en gardant la bouche fermée… Vous verrez instantanément l’effet décongestionnant!

Respirer par le ventre?
Bien respirer signifie aussi respirer en utilisant non seulement son nez et ses poumons, mais aussi son ventre. Selon les experts dans le domaine de la respiration, un mouvement respiratoire optimal se fait par le nez et vers le ventre. L’inspiration devrait se faire en gonflant l’abdomen et, dans un deuxième temps, en gonflant légèrement le thorax.

En pratiquant une respiration abdominale, nous utilisons efficacement le diaphragme, qui est le muscle principal de la respiration, nous permettant ainsi une plus grande amplitude lors de l’inspiration, mais aussi une plus grande efficacité lors de l’expiration.

De plus, ce type de respiration permet l’activation de notre système de détente, le système nerveux parasympathique. Ça devient ainsi un outil précieux et accessible pour la gestion du stress et l’activation de fonctions essentielles telles que la digestion.

Respirer… pour la santé!
La respiration est ainsi utilisée depuis plusieurs milliers d’années comme un outil précieux pour la santé. Au fil des ans, des techniques particulières ont été développées afin d’en cibler certains effets thérapeutiques. En voici quelques exemples…

  • La cohérence cardiaque: cette technique consiste à inspirer sur 5 secondes et expirer sur la même durée et ce pendant 5 minutes. Elle serait associée à une diminution des hormones de stress, une augmentation de l’immunité et elle aurait des effets bénéfiques sur l’anxiété, la dépression et même la mémoire.
  • La respiration carrée: aussi appelée Samavritti en sanskrit, cette respiration consiste en une respiration composée de 4 périodes de 4 secondes : une période d’inspiration suivie d’une retenue du souffle, puis une expiration et aussi suivie d’une retenue du souffle. Elle serait utilisée par les athlètes de haut niveau pour ses effets antistress, pour ses bienfaits sur la mémoire et sur les performances athlétiques.
  • La technique Buteyko: utilisée chez les athlètes de haut niveau et pour aider au contrôle de l’asthme, cette technique consiste à diminuer sa respiration afin d’optimiser les effets d’une augmentation légère du dioxyde de carbone, le CO2. 
  • La technique respiratoire de Wim Hof : Inspirée de la respiration Tummo, cette technique respiratoire est utilisée depuis des siècles par les moines bouddhistes tibétains. Cette technique, abondamment expliquée sur Internet, aiderait à réguler le système immunitaire, le système nerveux autonome et elle pourrait aussi aider à l’humeur et au sommeil.
  • Le chant Om: Le célèbre chant Om, inspiré du mantra hindouiste, aurait aussi des vertus pour la santé. Le fait de produire le son Om lors de la respiration sur une période prolongée serait associé à une activation du système nerveux parasympathique, à une meilleure fonction pulmonaire et à une diminution de la congestion nasale grâce à l’oxyde nitrique.

Je m’aime, 20 000 fois par jour
Oui! Respirer, c’est vraiment bon pour la santé! Non seulement pour oxygéner le corps, mais  pour la multitude de bienfaits que nous venons d’énumérer. Mais pour bien respirer, comment fait-on?

Une respiration optimale se fait par le nez, en gonflant l’abdomen et légèrement le thorax lors de l’inspiration. Cette respiration se fait aussi à un rythme beaucoup plus lent que celui auquel nous sommes habitués soit à un rythme autour de 12 à 14 respirations par minute.

S’il est vrai qu’il n’est pas réaliste de penser constamment à votre respiration, lorsque vous le pouvez, rappelez-vous de respirer plus lentement, par le nez et par le ventre. Et surtout… Soyez conscient de tous les bienfaits que votre respiration apporte à l’ensemble de votre corps! Et… Remerciez-vous! Parce que plus de 20 000 fois par jour, vous prenez soin de vous!

Version intégrale du texte dans le numéro où est paru cet article

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