Non… Un si petit mot… Trois petites lettres qui, une fois prononcées, peuvent à elles seules faire la pluie et le beau temps.
Voulez-vous bien me dire pourquoi, une fois devenus adultes, nous devons réapprendre à le prononcer sans trembler, alors qu’à deux ans nous le prononcions à tout vent? Que s’est-il passé?
Il était une fois…
À deux ans? Eh bien! nous étions l’autorité suprême devant laquelle tous nos contemporains devaient se prosterner. Dès qu’on nous demandait de faire quelque chose qui, pour nous, n'avait pas de sens, on se positionnait : non, non et non! Fini. Basta. Point barre.
Mais le temps nous a montré que notre autorité n’était pas aussi suprême qu’on se l’était imaginée... Ceux qu’on avait pris pour nos contemporains étaient non seulement nos souverains, mais notre vie dépendait de leurs bons soins! C’était maintenant à nous de nous prosterner.
Par peur de perdre…
On a vite compris que le mot non devrait dorénavant être prononcé avec parcimonie si on voulait rester dans les bonnes grâces de la suprématie, quitte à le remplacer par un oui pour éviter les ennuis.
On a aussi compris que l’amour inconditionnel existe, mais à certaines conditions, par exemple celle d’acquiescer à ce qui nous est demandé, même si parfois tout en nous s’y refuserait. Il faut ce qu’il faut pour être aimé!
On a donc dû parfois mettre de côté notre « être », soit qui on est, pour devenir qui on veut que l’on soit, taire ce que l’on ressent pour éviter le jugement et commencer à dire oui à tout vent. Dans notre tête d’enfant, le mot non était inconsciemment devenu synonyme de malédiction.
Je veux être…
Toujours aussi inconsciemment, on s’est mis à prioriser le « vouloir être » au détriment de « l’être ». Vouloir être aimé.e, apprécié.e, accepté.e, valorisé.e, reconnu.e… est devenu notre quête. Le regard que l’on portait sur soi n’avait dorénavant que peu de poids en comparaison à celui porté par autrui.
À un certain niveau, c’est un peu comme si nous en étions venus à nous effacer de l’équation, comme si nos besoins ou notre opinion n’avaient plus à être pris en considération. On me demande...? Je réponds oui. J’ai trop peur de perdre ce que j’ai si difficilement acquis; même si, pour y arriver, j’ai dû abandonner sur le bas-côté des p’tites parties de qui je suis.
Bienvenue sur Terre
Si nous avons choisi de nous incarner sur une planète où règne la dualité, c’est que le non est aussi important que le oui, tout comme le sont l’ombre et la lumière, le chaud et le froid, le jour et la nuit, la foi et le doute… En se privant de notre droit de dire non, c’est comme si on se coupait de 50 % des options d’évolution mises à notre disposition.
Bien entendu, ça ne veut pas dire de dire non tout le temps. Si ma fille m’appelle à 6 h du matin parce que sa nounou a des problèmes de santé, je vais y aller sans même réfléchir. Je parle surtout des situations plus anodines du quotidien comme une invitation à diner ou un coup de main demandé qui ne tombent pas à point nommé.
C’est à moi de choisir
Apprendre à dire non ce n’est pas seulement par rapport à la demande d’une tierce personne, ça peut aussi être par rapport à des situations de notre vie! Apprendre à dire non, c’est avant tout choisir ce à quoi on dit oui!
Je peux choisir de dire non à la survie pour prioriser la Vie; dire non au mental pour prioriser la spiritualité; dire non à tout ce qui est insensé, aux dérives de la société, à une science dénaturée, à une gouvernance déshumanisée. Je peux non seulement dire non, mais je dois surtout le faire aussi! Il est fini le temps de dire oui à tout vent juste pour vouloir être aimé.e.
Puiser à la bonne Source
« Qu’il y ait au centre de vous-même un homme averti », a dit un jour Jésus à Thomas. Quand j’ai lu cette phrase, je l’ai tout de suite aimée. Chacune et chacun de nous possède, au cœur de son cœur, une sagesse immuable capable de l’aider à savoir quand et comment dire oui ou non. Il suffit d’y puiser.
Lucie Douville, Éditrice
Version intégrale du texte dans le numéro où est paru cet article