On a beau essayer toutes sortes de pratiques spirituelles pour avoir une bonne estime de soi, mais à un moment donné, quand la vie devient plus difficile, que la pression monte et que, comme nous l’avons vécue durant la pandémie, on perd tous nos repères, on se retrouve confiné, seul avec soi-même, on peut vite perdre ses repères. Comment savoir alors où en est notre véritable estime de soi?
Par Lilou Macé
Chaque jour qui passe, l’estime de soi, ce regard que l'on porte sur soi-même et l'appréciation que l'on fait de sa propre valeur ou de son importance, met à mal beaucoup d'êtres humains! Comment transformer cette situation? Tel est le sujet que nous allons aborder avec Issâ Padovani.
Tout d’abord, Issâ, comment définirais-tu l’estime de soi?
L'estime, soit ce qui est estimable en nous, ce à quoi on peut donner une valeur, c'est quelque chose qui, au départ, ne vient pas de nous. Ça vient de l'extérieur. Lorsque nous étions enfants, nous étions joyeux, innocents, ne faisant pas la différence entre l’univers et nous. Pour nous, l’extérieur n’existait pas. Nous étions de pures petites boules d'amour.
Mais l’environnement dans lequel nous avons grandi a commencé à nous renvoyer une image de nous-mêmes qui n’était pas toujours positive : « Arrête de pleurer... Reste tranquille… Tu parles trop fort… » Or, comme le jeune enfant ne fait pas la différence entre « ce que je fais » et « ce que je suis », quand on lui a dit que ce qu'il faisait n’était pas correct, il a enregistré « ce que je suis n'est pas correct ».
Il y a donc eu des estimations plus négatives de lui-même qui ont commencé à s’inscrire en lui. Là où il n'y avait que de l'amour, il y a eu des estimations, des jugements de valeur. Et donc, de l'amour de soi, qui était sa nature originelle, il a commencé à développer ce qui s'appelle l'estime de soi. Mais, au départ, ça ne faisait pas du tout partie de lui.
On nous a mis sur une fausse piste?
Personnellement, je crois que tant que nous allons essayer de travailler sur notre estime de soi, nous risquons d’expérimenter jour après jour les hauts et les bas des montagnes russes reliés à la recherche de l'estime de soi. Il va y avoir des moments où l’on va faire ce que l'on valorise, ou ce que notre entourage valorise, et là on va être tout en haut de la montagne. À ce moment-là, on va s'aimer, on va revenir à cet amour initial que nous avions quand nous étions enfants. On dira alors qu’on a une bonne estime de soi.
Et puis, à un autre moment, on va faire quelque chose qui ne correspond pas à nos valeurs, ou à ce qui est valorisé par notre entourage, et on va se retrouver tout en bas de la montagne à se dire qu’on est nul, qu’on n’est bon à rien, etc. L’estime de soi sera alors à son plus bas.
Ce n’est rien de trop réjouissant
Tant que je vais fonder ma vie sur l’estime de soi, plutôt que sur l’amour de soi, je vais vivre des hauts et des bas. Je dois plutôt chercher à savoir comment je peux m’aimer; comment réaliser que je suis un être inestimable, sans que cela vienne d’autrui ou de moi-même? Comment prendre une autre voie, soit celle de la compassion, la voie de la célébration de qui je suis?
Si je fais quelque chose qui me plait, que je valorise, eh bien, je vais célébrer… Je vais dire merci la vie, merci de m'avoir donné les moyens, merci pour ce que j'ai fait. Je vais être dans la célébration.
Et s’il survient un down, si je fais des choses qui ne correspondent pas à mes attentes ou à mes valeurs, au lieu de me dénigrer, je vais apprendre à être empathique envers moi, je vais faire preuve d’accueil, de compassion à mon égard. Je vais quitter la voie de l'estime de soi pour emprunter celle de l'amour de soi.
Version intégrale du texte dans le numéro où est paru cet article