Nous habitons sur une planète dont le modus operandi est pour le moins déconcertant, pour ne pas dire complètement déroutant… C’est comme si nous participions tous à un rallye dont les indices nous conduisaient plus souvent qu’autrement sur de fausses pistes.
Coup d’envoi…
Dès notre arrivée, on comprend qu’il y a moi et l’autre, que sans l’autre non seulement je ne serais pas ici, mais que par moi seule je ne pourrais assurer ma survie. Notre premier indice est donc : L’autre est la personne la plus importante de ma vie.
Durant notre enfance, on va vite réaliser que pour que nos besoins soient comblés, c’est vers l’autre que nous devrons nous tourner. Notre deuxième indice sera alors : J’ai besoin de l’autre pour répondre à mes besoins.
Dans la même foulée, c’est par le regard et les paroles de l’autre que nous pourrons bâtir notre identité, notre estime de soi et notre confiance en soi, ou pas... Troisième indice? L’autre sait mieux que moi qui je suis.
En cours de route
Arrivés à l’école, c’est en répondant aux exigences de l’autre, tout en étant comparé aux autres, que notre valeur sera chiffrée sur un bout de papier. Et là, on fera tout ce qu’il faut pour ne surtout pas être rejeté, quitte à soustraire des fractions de notre identité. Quatrième indice : Je dois tout faire pour être accepté.
Les années vont passer et au besoin d’être accepté va s’ajouter celui d’être aimé. Pas besoin de vous dire ici que, pour l’autre, on pourra faire bien des folies, jusqu’à, parfois, se laisser manipuler, rabaisser, contrôler, voire même humilier. Tout ça juste pour être aimé. Cinquième et dernier indice : Je dois tout faire pour plaire, pour que l’autre puisse m’aimer.
L’autre va devenir tellement important dans notre vie qu’on ne verra plus qu’elle ou lui, oubliant parfois complètement qu’on existe nous aussi.
Bien veiller sur qui au juste?
Si je savais ce que voulait dire le mot « Bienveillance », j’ignorais complètement que nous devions l’adresser à nous-mêmes en premier. Bienveillante envers moi? Je ne connaissais pas! Mais envers les autres, ça, aucun problème! J’en faisais même souvent plus que le client en demande, avant même qu’il ne le demande. Mais pour moi?... En fait, je n’avais jamais vraiment pris conscience qu’il existait un « moi » dans ma vie.
J’avais appris…
J’avais appris à m’oublier pour les autres, à donner sans compter; à dire oui même si je n’en avais pas vraiment envie et surtout pas question de dire non! J’avais appris à me débrouiller par moi-même, peu importe le défi à relever, car j’étais littéralement paralysée par la peur de déranger.
Je n’avais jamais appris…
Personne ne m’avait jamais dit que j’étais la personne la plus importante de ma vie; que j’aurai toujours tout ce qu’il faut pour répondre à mes besoins; que personne au monde ne saura jamais mieux que moi qui je suis; et surtout… que je n’ai absolument rien à faire de plus qu’être moi-même pour être acceptée ou aimée et que, sinon, une seule chose à faire : tourner les talons.
S’occuper de… Ou veiller sur…
J’ai compris qu’il y a une différence entre « s’occuper de soi » et « veiller sur soi ». « S’occuper de soi » c’est, par exemple, faire attention à son alimentation, son sommeil, ses exercices, ses loisirs… C’est donc surtout au niveau du « faire », c’est intellectuel, extérieur, ça vient de la tête.
« Veiller sur soi » c’est à un tout autre niveau. C’est au niveau de « l’être », du « Je suis », du ressenti. C’est au niveau des aspirations qui nous tiennent à cœur, des rêves que l’on porte. C’est intérieur, ça vient du cœur, ça nourrit l’âme. Si on s’occupe de soi pour réussir dans la vie, on veille sur soi pour réussir sa vie.
La seule piste à suivre
Dans ce Grand Rallye qu’est la Vie, l’autre n’aura jamais été la personne la plus importante de notre vie, mais de la sienne, ça oui! Et c’est la même chose pour nous aussi!
Prendre soin de soi, être bon pour soi, attentionné, prévoyant, cultiver une bonne estime de nous-mêmes, c’est loin d’être égoïste, c’est vital! En réalité, c’est le seul et unique indice qu’on aurait dû nous donner à l’arrivée.
Lucie Douville, Éditrice
Version intégrale du texte dans le numéro où est paru cet article