Chaque enfant naît avec les émotions de son passé utérin. Entre la 27e semaine de grossesse et le 20e mois de sa vie, le bébé construit les connexions cérébrales qui seront la base de son unicité. Derrière le passé utérin, il y a, inscrit dans sa mémoire génétique, l’histoire de tous les autres avant lui. Mais, si l’on ne peut changer l’inscription du début de la vie, on peut en changer la suite.
Par Claudette Rivest, Auteur
La société actuelle est différente de celle d’hier. La trajectoire de l’enfance est nécessairement différente. Aujourd’hui, plusieurs adultes deviennent parents dans la trentaine et la majorité des mamans retournent au travail après leur congé de maternité.
Une bulle exempte de frustrations est cependant impossible. Il faut admettre qu’à l’instar des mères, certains enfants vivent difficilement la séparation précoce imposée par la pression sociale. Notre société serait-elle en train de l’oublier…
Petits malheurs et grosses blessures
Quelle que soit la structure sociale, le rôle des parents reste le même, celui d’aider l’enfant à s’adapter en le protégeant physiquement et en ne laissant pas ses émotions sous silence. Les petits malheurs et les grosses blessures, les pleurs et les cris sont les manifestations des émotions intenses et des tensions que l’enfant a besoin d’évacuer. Certaines causes sont parfois difficiles à expliquer. Toutefois, leurs émotions sont toujours vraies : elles sont leur vérité première.
Avant le langage, l’enfant ne sait pas comment y réagir. L’adulte se doit d’être disponible pour consoler car la souffrance d’un tout-petit qui ne parle pas ne sait pas attendre. Prendre affectueusement dans les bras a généralement le pouvoir de l’apaiser.
Éviter les cicatrices difficiles à guérir
Privilège ou devoir, l’adulte est celui qui reçoit les souffrances de l’enfant. Lorsque l’enfant d’âge préscolaire tait ses frustrations et obéit sans contestation et sans pleurs, il n’est pas moins souffrant. Même s’il a déçu, il faut que quelqu’un s’engage à défendre l’enfant. Il faut s’occuper des blessures car elles s’ajoutent au poids de l’histoire familiale déjà engrammée dans sa mémoire.
Les blessures de l’enfance, ni même l’héritage psychologique transmis par ceux qui l’ont précédé, ne sont imputables à l’enfant. Lorsqu’il est en mesure de comprendre, on peut lui parler du trouble qui a pu être semé en lui. Jusqu’à ce que l’enfant puisse avoir suffisamment de maturité pour s’expliquer lui-même, il a besoin de quelqu’un, acquis à sa cause, qui prendra la parole en son nom et tentera de réparer sa souffrance.
Pour trouver sa propre identité, il doit à tout prix se dégager des secrets d’un passé qui n’est pas le sien. Sans explications, il y a le risque que les non-dits s’imprègnent et causent des cicatrices difficiles à guérir et, ultérieurement, des préjudices dans le développement de son identité.
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